Embarquez avec nous pendant 3 jours (et 5 articles co-écrits) sur la Whanganui River !
L’heure du départ
Riiing, riiing! Ouch il est 6h30 déjà ? Il a fait tellement froid cette nuit qu’on est encore bien dans les vap’s lorsque le réveil sonne. D’ailleurs dehors l’humidité est forte, alors que le soleil tente de dissiper le nuage dans lequel nous sommes. On s’empresse de tout plier, avaler un petit-déjeuner, clore chacun de nos 7 barils (euh, 8 me dit-on dans l’oreillette, en comptant le gros pas trop étanche), garer le van, et s’empresser de rejoindre (on est les derniers, comme d’hab, haha) les 4 autres couples dans la salle commune pour le briefing.
Nos bagages
8 barils ! Mais qu’est-ce qu’il y a dedans ? Heureusement, chaque baril a une étiquette que l’on a baptisée au marqueur noir pour savoir ce qu’il contient (et éviter de tous les ouvrir dès qu’on veut une barre de céréale, pas bête hein !). Enfin, ça c’est la théorie, car pour les fermer hermétiquement il faut appuyer dessus avec le genou tout en cerclant avec les deux mains, et évidemment les labels se décalquent rapidement sur le pantalon de Nico plutôt que de rester gentiment là où ils auraient dû.
- Baril n°1 : les affaires de jour, le matériel électronique, les barres de céréales, les chapeaux, la crème solaire et les biscuits au chocolat
- Baril n°2 : l’eau. Oui oui, on a un baril avec 7 bouteilles d’eau, on ne sait jamais! (Il n’y a pas d’eau potable sur le trajet, sans être bouillie au préalable)
- Baril n°3 : les vêtements et changes
- Baril n°4 : les habits chauds et vestes, avec les polaires et tutti quanti
- Baril n°5 : la bouffe ! avec les conserves, le pain, les soupes lyophilisées, les pâtes, la confiture et le beurre de cacahuète. Pas question de se laisser abattre
- Baril n°6 : les sacs de couchage, les draps de soie et la bâche
- Baril n°7 : la couette et la couverture en polaire, car nos duvets sont loin d’être faits pour les températures nocturnes de Nouvelle-Zélande…
- et le numéro complémentaire, le n°8, le gros bleu pas trop étanche : la tente, les tapis de sol et les ustensiles de cuisine
Le briefing avant la mise à l’eau
Nous voici donc tous assis dans la salle commune, avec le nuage qui s’estompe et découvre à travers la baie vitrée le paysage ensoleillé sur les collines vertes avec au fond le massif du Tongariro. Magique !
Le fils de la famille qui tient le business arrive avec ses bras de kayakiste à faire pâlir un rugbyman. Il nous fait le briefing sécurité à coup de « sweet as » bien kiwis (Emi était morte de rire car avec la prononciation du terroir, elle pensait qu’il nous appelait « gentils culs » pendant toute la présentation). S’ensuit alors un topo de près d’une heure, schémas et vidéos à l’appui, de comment prendre les rapides, comment pagayer, comment accoster, comment écoper, comment faire si on chavire… Euh, la rivière est si compliquée que ça ? Vous voulez le savoir ? haha, nous vous laissons découvrir la suite 🙂
Un café maison, du pain maison et de la confiture maison plus tard, on embarque tout le beau monde dans un minibus direction le point de départ. Plus d’une heure à tortiller sur des routes de terre, à la vitesse kiwie, ça donne un peu le mal de mer… surtout avec le délicat fumet des deux bon gros pépés Australiens du bush de devant et de la testostérone des deux jeunes Allemands derrière nous.
Les pagaies sont dans l’eau ! Avec les barils bien accrochés par des cordes passant dans chacune des deux poignées. Les barils et tous les objets par ci par là sont fixés à des bouts de ficelle car « si vous vous renversez vous ne ne les reverrez jamais » (vue la couleur de l’eau marron trouble : on comprend bien pourquoi !).
11h00, c’est parti pour l’aventure ! « See you in 2 days ». Nous nous élançons dans notre canoë canadien deux places, Nico à l’arrière à la barre, Emi à l’avant prête à fendre la bise.
Au fil de l’eau – 1ère étape : De Whakahoro à John Coul
La rivière aux eaux brunâtre nous porte doucement et il nous faut à peine quelques minutes pour prendre nos marques dans le canoë. Avant tout, il s’agit d’équilibrer ce rafiot car on penche sérieusement à droite, ce qui n’est pourtant pas notre genre ! On joue donc sur le chargement des barils grâce à des tensions de cordes pour revenir parfaitement à l’équilibre (enfin, jusqu’à ce que ce soit au moins au standard kiwi « good enough »).
Après quelques centaines de mètres, notre petite rivière Retaruke se jette dans la grande : la Whanganui River. C’est la rivière navigable la plus longue de Nouvelle-Zélande. Par navigable il ne faut pas espérer y voir passer des péniches, car lorsque rapides il y a, la hauteur de fond ne dépasse pas le mètre. Seuls les canoës et les jetboats (ces hors bords ultra-puissants) sont acceptés par la rivière.
C’est parti ! Plus de 100 kilomètres en trois jours à descendre ! Et vu le courant, heureusement que le parcours est dans ce sens là… Très vite, nous nous sentons immergés en pleine nature sauvage (« into the wild » finalement). Et nous prenons place au milieu de ce cours large et puissant dont l’eau nous emmène, sillonnant entre des berges pentues couvertes de végétation lorsque les falaises le permettent.
Oula ! un premier rapide droit devant ! Bon, pas d’affolement, il est juste temps de mettre en pratique la formation du matin. Où est le « V » de l’eau ? un peu à gauche ! Aussitôt dit, aussitôt dedans et sortis sans encombre. « Easy peasy » comme ils disent par ici. Et franchement, si on n’a que des rapides aussi faciles, avec quelques vaguelettes et sans cailloux, ça va être tranquillou. Notre Ardèche française, ou autres gorges et torrents de montagne sont d’un niveau hautement plus sérieux ! Et Nico met en pratique aisément ses coups de pagaie directifs, tandis qu’Emilie se dresse debout avant chaque rapide pour scruter les éventuelles difficultés. Ces deux-là, ils iront loin 🙂
Nous avons été les bons derniers à partir et conservons notre position avec force et volonté : nous sommes absolument seuls à observer ce qui nous entoure. L’ambiance doit être bien différente en plein été lorsqu’il y a des centaines de canoës sur le trajet. Et c’est tranquille mimille que nous arrivons à une petite plage de rochers pour déjeuner. Emi saute du devant, la corde d’amarrage à la main, pour sortir le canoë du courant et permettre à Nico de débarquer les pieds secs. Ah non loupé ! pieds trempés aussi, sacrément glissantes ces pierres…
Quelques conserves plus tard, nous partons de Mangapapa. Ce site de camping, nous sommes bien content de ne pas devoir y passer la nuit vue la planéité du sol toute relative !
Plus le temps passe, plus nous devenons efficaces à pagayer. Et heureusement faut dire, car quitte à passer 7 heures par jour sur l’eau à pagayer, pagayer, pagayer,… autant économiser nos muscles et faire avancer correctement le rafiot ! A l’arrière, Nico alterne deux coups de pagaie à gauche, deux coups à droite, un rétablissement de direction, et devant Emi impose le rythme. Plouf, plouf, plouf, plouf, pfiou, pfiou, pfiou..! ça déménage !
Alors que les heures passent, les nuages aussi, et c’est un ciel de plus en plus bleu qui égaie nos visages et nos sourires de plus en plus larges. Le soleil jaune vient baigner la rivière qui se teinte aux couleurs du ciel, et faire éclater les verts de la végétation qui s’accroche aux berges. Herbes claires tout d’abord, remplacées par des buissons plus foncés, puis des fougères dégradés du vert au rouge, et enfin des arbres massifs, des arbres fougères et quelques palmiers.
♪ Planquez-vous, j’ai vu bouger ! ♫ ah non ce ne sont que des chèvres sauvages aux petites cornes, tantôt noires, tantôt blanches, tantôt les deux, qui broutent les herbes en regardant passer les touristes. ♬ Approchons-nous… tout… doux… ce….ment ♪ : pas farouches ces têtes de biques !
Comme la fin d’après-midi se fait sentir, allons-y, retournons pagayer vers notre destination ! La signalisation du chemin laisse à désirer. Pas que nous ne sachions lequel prendre, car comment dire… il n’y a qu’une rivière à descendre. Mais plutôt que la carte qui nous a été donnée est peu précise et qu’il n’est pas simple de savoir où nous sommes. Et pas un seul panneau sur les côtes ne nous dit : « prochain site de camping 5km », ou « vous voulez une glace ? eh bien il va falloir ramer pendant 2 jours ! ». Et nous pagayons, pagayons, évitons des branches, pagayons… Toujours pas vu Ohauora, un site de camping à partir duquel il nous reste encore 2h à pagayer. Et il est déjà 18h, oups ! Vous avez déjà fait du canoë en pleine nature, sur une grande rivière au courant imprévisible, à la frontale ? Pas nous, et on va éviter !
Nos yeux voient-ils bien clair ? serait-ce un panneau 500m au devant ? Ouiiii ! Les paris sont ouverts : Ohauora ? on serait alors bien à la bourre et on risque de finir de nuit… John Coul ? alors ce serait une grande surprise car cela voudrait dire que nous avons été plus rapide que les temps annoncés. Emi : John Coul. Nico : Ohauora. Suspens intenable… C’est Emi qui l’emporte ! Et nous sommes tous les deux bien soulagés car on n’en aurait pas mené large (ou plutôt étroit vues les gorges) de nuit.
Le Premier camping : SuperPapi ranger
C’est avec soulagement que nous accostons sur la rive de notre premier camping, accueillis par un papi radieux qui nous salue d’une main, l’autre posée derrière son dos. Nous retirons les 8 bidons du canoë et attachons à un bout notre véhicule pour la nuit, à un branchage aux feuilles encore vertes sur les conseils du loueurs (sinon il risque de partir à Pipiriki sans nous attendre dans la nuit !) Une fois tous les bidons hors du canoë, nous les grimpons jusqu’au campement avec la force des bras qu’il nous reste. Il y a juste une petite place entre la tente des français et celle des allemands. Au dessus, la famille de kiwis a déjà investi la place et en-dessous, le Suisse et les Anglais. C’est un campement international ce soir !
Nous avons à peine le temps de sortir la tente des bidons que déjà SuperPapi ranger vient nous voir. Il nous demande comment s’est passé la journée, si nous avons apprécié les paysages, si nous avons bien tout ce qu’il nous faut… et nous invite même à utiliser le refuge pour nous faire à manger ce soir, au chaud, car il semble qu’il va faire un peu froid. C’est adorable !
Nous nous préparons les petits plats de la cantine militaire que Nico a vaillamment gagné en aidant l’armée à Christchurch à désembourber leur véhicule. Ils mangent bien les escadrons néo-zélandaise ! Un demi « butter chicken » et un demi « tajine veggie » plus tard, nous faisons chauffer un peu d’eau pour une soupe (améliorée avec un fond de purée lyophilisée et quelques morceaux de choux), puis une tisane… histoire de sortir de la tente toute la nuit pour aller faire pipi ! Allez… zou au lit.
Au petit matin, à 6h30, un soleil radieux nous accueille et nous rangeons nos duvets e tutti quanti dans la tente. Emi file au refuge pour préparer le petit déjeuner : tartines et thé bien chaud pendant que Nico remballe les dernières affaires dans les bidons en laissant la tente sécher. Après un petit dej où nous avons discuté avec les français de nos voyages respectifs, nous retournons voir notre maison prête à rentrer dans le bidon ! Hop hop hop nous descendons les barils… et… on ne sait pas par quel miracle, alors que nous étions quasiment les premiers levés (le Suisse étant hors concours !) nous voilà, encore, les derniers partis ! Ah oui… c’était sans compter sur SuperPapi Ranger qui nous a tenu la conversation pendant une petite demi heure, avec grand enthousiasme, sur sa mission de ranger qu’il réalise deux fois par an avec cœur. Allez… on ne ne lui en veut pas, nous avons adoré papoter avec lui ! Et c’est aussi pour ça qu’on voyage !
Pour lire la suite, c’est ici !