Nous faisons partie de la famille Maorie !
Prélude
Avant de commencer la-dite cérémonie d’introduction, nous avons droit à un petit briefing sur les us et coutumes maories. Et c’est tant mieux, cela nous évitera un impair lors de la cérémonie officielle imminente !
La maîtresse des lieux Maorie nous accueille devant un portique de bois. C’est par celui-ci que tout nouvel invité doit entrer pour la première fois. Dans la société Maorie, il n’est pas possible de pénétrer sur les terres d’une tribu sans passer par la cérémonie d’initiation « the welcoming ceremony ». Malgré la répétition quotidienne de cette événement avec de nouveaux étrangers, nous sentons que notre hôtesse y met toujours du cœur, et que c’est important pour elle. Elle nous donne toutes les informations pour que la célébration se déroule suivant la tradition et que les hôtes (nous) soient bien accueillis.
Entrée en scène
Nous entrons dans un ordre précis sous le portique : les hommes devant, leurs femmes (et éventuelles marmailles) derrière. Au début de la cérémonie, ne sachant pas encore l’issue, les hommes protègent leur famille dont ils sont les ambassadeurs. Devant nous, un spacieux terrain, sur lequel se dresse un grand totem (qui nous sera expliqué dans quelques minutes), le marae de la tribu (la maison commune), quatre rangées de bancs pour les invités (faisant face au totem et au marae), et deux rangées de bancs pour les locaux (à côté du marae). Emi suis donc Nico de près, et lorsqu’il prend place sur le 1er banc, elle s’installe sur le 2ème banc à son niveau.
Nos hôtes restent très concentrés et concernés : Elle, porte un tissu aux motifs tribaux, Lui, garde un air solennel appuyé sur sa canne. Notre rythme cardiaque s’accélère, et nous nous sentons présents, entièrement.
Accueil Maori
Notre hôte nous parle en Maori pendant un moment, puis nous traduit en anglais. Lorsque des tribus se rencontraient, il en était de même : leur langue locale, puis une langue commune. « Je suis l’homme de la maison, et voici ma jolie femme derrière moi. Vous êtes sur les terres de notre divinité locale (il nous montre le totem). Je vous souhaite la bienvenue dans notre demeure. Après cette cérémonie vous serez ici chez vous et je vous pris d’agir comme les membres d’une même et grande famille. Protégés par le totem de nos dieux (il montre le totem à nouveau), j’espère que vous passerez un agréable séjour avec nous. » Ensuite, sa femme s’approche de lui et commence à chanter un chant Maori. Elle bredouille à un moment, on la sent timide. Alors, son mari qui ne l’a pas quitté des yeux, commence à fredonner avec elle, comme pour lui donner un peu de son courage, et surtout, son affection. C’est un moment qui nous touche beaucoup.
Réponse des invités
C’est au tour des hommes invités de se présenter. D’abord le père de famille Kiwie suivi de sa compagne qui chante la chanson de Disney « Moana » (réprimandée par sa fille qui dit « c’est pas comme çaaaaa ! ») ; puis l’Anglais suivi d’un chant aux consonances celtiques, après, le Hollandais (qui parle d’abord dans sa langue d’origine puis traduit en anglais). Ils chantent avec sa femme une sorte de comptine. Nos hôtes ont l’air ravis d’entendre ces sonorités de partout : à la fois les langues maternelles, et les mélodies des chants originaux !
Enfin Nico nous présente à l’assemblée : « Bonjour, je m’appelle Nicolas et suis ici avec ma partenaire Emilie. Nous sommes Français, et venons de Paris. Nous sommes en Nouvelle-Zélande pour vivre de belles expériences comme celle-ci, et nous vous remercions chaleureusement pour votre magnifique accueil ».
Emi se force un peu pour chanter quelque chose devant tout ce beau monde… mais puisque tout le monde l’a fait, elle passera moins inaperçu en participant qu’en ne faisant rien ! Ce sera donc un chant un peu jazzy qu’elle apprend aux colons (pas les Pakeha bien entendu, mais les enfants des colonies de vacances). Dynamique, cette petite mélodie semble plaire à nos hôtes Maori.
♪ Calme, Cool, je ne vois rien qui soit suspect, j’peux continuer,
Planquez-vous dans ce coin là j’ai vu bouger
C’est pas le moment de s’amuser
Approchons-nous, tout, dou-ce-ment, allons y que chacun reste Calme ♫
Une fois terminé, quelques applaudissement émanent des bancs derrière et de nos hôtes… Emilie devient toute rouge… pour passer inaperçu, c’est raté ! (mais bon ça fait quand même plaisir).
Le salut traditionnel
Nous avançons en ligne jusqu’à nos hôtes devant leur maison. Ils nous prennent la main droite et colle leur front sur le nôtre. Ça y est ! Nous avons fait notre première intégration Maorie ! Dorénavant, même si dans plusieurs années nous revenons, nous aurons le droit de siéger à côté d’eux lors des futures cérémonies, et n’avons pas pour obligation de la refaire. Sauf ! si nous sommes accompagnés d’autres membres de la famille qui n’ont ne sont pas passés par le rituel (ouf, Célestine est tranquille!).
Histoire et compromis
Nous apprenons ensuite que la famille vit sur cette terre depuis des générations, mais que cela n’a pas toujours été simple. A l’arrivée des colons, leurs terres leur ont été confisquées par la couronne d’Angleterre. Pour autant, ils ont continué à y résider « illégalement », ne voulant pas quitter leurs traditions, ni leurs Dieux de la rivière. Difficile d’imaginer des gens vivre ici, loin de tout, avec pour seul accès à ce terrain la rivière qu’ils descendaient (et remontaient aussi forcément) en waka (canoë) ! Cela dit, cette petite tribu à résisté encore et toujours à l’envahisseur… jusqu’à ce qu’un accord avec le Department of Conservation soit trouvé : faire de l’espace devant leur terre un camping du DOC pour accueillir les canoéistes (comme nous) et qu’ils deviennent les gardiens de la terre. Dans leur discours ils semblent contents de cet accord, même si d’autres Maoris ne l’ont visiblement pas accepté. Cela doit être délicat comme choix, et nous n’aimerions pas être à leur place : trouver un compromis en cédant sur ce qui pourrait déjà relever de l’injustice ou tenir sa position pour ne pas se sentir lésé…
Il paraît incroyable que les colons aient pu s’octroyer tant de droits, laissant les natifs sans ressources, forcés de s’accoutumer à une culture qui n’était pas la leur.
Encore aujourd’hui, nous n’avons pas le réel sentiment que Maoris et Blancs aient trouvé une harmonie constructive en faisant fi du passé (et notre avis mitigé est alimenté par ce que nous avons appris dans les musées, cf autres articles).
Totem et plantes symboliques alentours
Après la cérémonie, la femme nous explique l’histoire et la symbolique du Totem. Celui-ci est en Totara : bois très dur et rouge, abondant en Nouvelle-Zélande, permettant de réaliser canoë (waka), totems (logique) ou encore maisons, tout en étant sculptés, peints et ornementés.
Sculptés sur le totem, nous découvrons des divinités : Au pied, la plus grande est Te Kainga : celle protégeant la partie de la rivière qui passe juste ici. Ta Kainga est également le symbole de cette tribu, donc, de ce Marae… On comprend mieux le nom du Campsite !
Au-dessus, se succèdent les trois autres protecteurs de la rivière (situés en amont et aval) ainsi que les représentations divines de Taranaki et Ruapehu, les deux volcans les plus imposants.
Sur la propriété, d’autres symboles sont présents :
- des fougères aux grandes feuilles, dont les jeunes pousses (koru) forment une superbe spirale poilue. Ces korus sont le symbole du renouveau de la vie, d’un nouveau commencement. Et par extension de la vie en perpétuel mouvement tout en restant la même. Il semblerait que les korus se mangent…et ont un goût d’asperge !
- la flax (lin local) harakeke représente avec ses feuilles la famille (whānau). Les feuilles centrales sont les enfants, entourées et protégées par ses parents (awhi rito) puis grands-parents (tūpuna) à l’extérieur.
Déjà au-revoir
Tout le monde est parti et nous sommes encore les derniers… oui mais c’est tellement chouette de vivre ce moment authentique qu’on y resterait bien plus longtemps… Cela dit, il est temps d’aller chercher notre embarcation et de reprendre, car 4 heures de navigation nous attendent.
Notre hôte insiste pour nous prendre en photo à côté de ces plantes, pour nous souhaiter du bonheur et un nouveau commencement. Puis elle nous quitte en nous rappelant de bons conseils pour bien naviguer la dernière portion de rivière…
« Surtout, si vous chavirez, n’oubliez pas : vous serez alors bénis par le dieu de la rivière » (n’oublions pas ce détail important pour la suite….ahah) « et revenez nous voir ! »
Pour en savoir plus sur nos compagnons de galère, c’est ici !